2018 01 La nuit par Martine
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ATELIER
D’ECRITURE « ECRI’VET »
A partir de
photos de L'Atelier Photo / VET
sur le thème de LA
NUIT
Déroulement de la séance :
Parmi les
photos du club sur le thème de LA NUIT, l’animatrice en a retenu 8. Ces photos
sont posées à l’envers sur la table. Toutes les 8 minutes une photo est tirée
au sort, retournée et chacun écrit durant 8 minutes à partir de cette photo.
Consignes d’écriture
Il s’agit
d’écrire 8 paragraphes d’une histoire qui se tient, chaque paragraphe
correspondant à une photo et à un moment de la nuit. Chacun des paragraphes
doit débuter par l’indication de l’heure à laquelle la scène se déroule.
Le récit
doit commencer par un personnage qui sort de chez lui, de nuit.
Il est 23 h, le spectacle de danse latine est
sur le point de se terminer. Déjà les portes s’ouvrent et les spectateurs
s’engouffrent bruyamment dans la rue, les yeux rougis par les lumières
aveuglantes et rougeoyantes de la scène.
La porte du
porche de l’immeuble voisin s’ouvre et laisse passer une femme svelte, brune,
ignorant complètement les hommes et les femmes commentant allègrement les
chorégraphies. Elle est habituée à ces moments-là, cela l’indiffère, elle a
toujours autre chose à faire ! Et la nuit ne fait que commencer pour elle.
Il est 23h02, changeant d’avis, elle s’arrête
quelques mètres plus loin, et sort une cigarette de son étui doré. Elle se
retourne et observe le mouvement des spectateurs, ses voisins d’un soir. Certains
sautent dans leur véhicule, d’autres prennent amoureusement le bras de leur
compagne et marchent vers la bouche de métro, mais beaucoup s’attardent en
s’offrant une cigarette et en l’allumant avec plaisir. La fumée des uns et des
autres, forme un halo dans la nuit rejoignant la fumée de sa propre cigarette.
Elle s’est créé son propre spectacle, elle reste dans la pénombre et eux sont
sur la scène !
Il est 23h10, elle continue tranquillement sa
route, elle est en avance pour son rendez-vous.
La scène
parlons-en, non la Seine, le fleuve. Elle le traverse en observant les
multiples cadenas accrochés au parapet du pont. Elle hausse les épaules. On
aurait dit que les architectes avaient conçu volontairement cette barrière de
croisillons permettant l’accrochage facile des cadenas ! Pourtant ils ne
pouvaient l’ignorer, dans toutes les villes de Barcelone à Venise, de Moscou à
Séoul, les parapets des ponts servent de lien aux amoureux !
Elle aime
passer un pont, surtout la nuit, l’attrait de l’inconnu, de l’autre rive -si
différente le jour- le symbole du passage encore plus fort et palpitant. Elle
s’attarde à regarder les eaux profondes et noires du fleuve parsemées des
points lumineux des réverbères que l’on devine le long des rives. Les statues
élevées de chaque côté du pont sont ses guides, elles la rassurent.
Il est 23h30, il faut maintenant qu’elle s’active. Au-delà du pont, se dessine une grande avenue moderne avec d’immenses immeubles de verre. Une lumière bleue se dégage des milliers de vitres écrivant leurs façades. La rue est déserte, c’est un quartier de bureaux, peu d’habitations. Pensive, elle se souvient de ce quartier, des petites maisons, des jardinets le composaient. C’était il y a longtemps déjà ! Elle y vivait, y allait à l’école…. Tout s’est transformé en un lieu humainement éteint !
Il est 23h45. Encore un petit quart d’heure avant de rentrer dans ce domaine de la finance. Elle aperçoit plus loin le pont des Magots, qui lui plait avec ses arches élégantes. Elle s’avance vers un photographe qui, comme elle, apprécie l’architecture de ce pont. Leur conversation est brève mais très intéressante, l’art de la photographie de nuit nécessite un grand savoir-faire ! Elle se sent plus légère dans cette nuit plus étoilée que les précédentes.
Elle s’en retourne vers l’immeuble bleu, elle n’est absolument pas motivée… Elle romprait bien ses engagements !
Il est minuit, elle s’avance vers la borne d’accès, puis recule, et renonce à son rendez-vous !
Elle préfère déambuler dans le quartier, des arbres que la nuit rend immenses lui font signe, aidés par une légère brise, agitant leurs chevelures feuillues. La rue descend en pente douce, on se croirait à la campagne, l’air est délicieux, l’atmosphère est calme. Elle sourit en pensant à l’homme qui l’attend, en costume trois pièces, et qui va l’attendre longtemps !
Le rendez-vous, c’était avec la nuit qu’elle l’avait !
Il est minuit et demi, elle chemine, se remémore son
enfance, son école, sa famille aujourd’hui disparue. Elle se souvient de la
destruction de son quartier. Des pelleteuses qui mangeaient de leurs dents
acérées les pans de murs des maisons. Elle se souvient même d’une nuit terrible
où un incendie s’est déclaré dans une
maison encore habitée. Quelle tristesse ! Tous les habitants étaient terrifiés
et c’était comme si on leur intimait cruellement de partir encore plus
vite ! Une colère ancienne se réveillait au fond d’elle et anéantissait le
bien-être de sa balade nocturne.
Il est bientôt une heure du matin. Les quelques nuages se sont
dégagés, c’est la pleine lune. Elle avance encore un peu, ne se sent pas en
insécurité malgré l’absence de vie autour d’elle. Un chien aboie plus loin,
curieuse, elle découvre un jardin avec une petite cabane… Dans Paris, c’est
extraordinaire ! Les lumières de la rue la rendent vivante, accueillante.
On devine des couleurs vives autour des petites fenêtres et de la porte. Elle
prend son téléphone et la photographie en espérant capter l’émotion qui
l’étreint. Elle se souvient du même cabanon dans son jardin d’enfance !
Cette balade
nocturne l’a comblée, elle rentre d’un bon pas dans son petit immeuble, sachant
que le calme est revenu dans sa rue.
Martine